Annuminas
L’ancienne ville se reflétait sur les eaux scintillantes, telle une vieille femme qui recherchait dans son miroir, sa beauté flétrie par les âges. Un amas de vieille pierre, voilà tout ce qu’elle était devenue. Oh, il restait bien quelques bâtiments encore intacts, lointains vestiges d’une époque glorieuse où elle était le centre du monde des hommes, mais ils étaient condamnés à l’oubli par l’inexorable travail de sape du lac Nenuial. Pourtant, elle portait à nouveau la vie en son sein, mais que de sacrifices avait-t-elle concédée pour ne pas rester seule, abandonnée par les peuples de la terre du milieu. Les noires légions d’Angmar rodaient dorénavant dans les ruelles démolies par le temps.
Face à la menace des angmarins, la poignée de rôdeur de l’ancienne race des Dunadains commença à s’organiser autour des autres peuples afin de lever cette malédiction et de récupérer, au nom de tous, celle qui était autrefois la ville de la Clairvoyante d’Annuminas. Hommes, Elfes, Nains et Hobbits, tous étaient appelés pour combattre les troupes maudites du Roi sorcier d’Angmar.
Personne ne fut donc surpris, en cette après-midi, de croiser une elfe en arme passant le pont de Tinnudir. Quelques rôdeurs venaient poliment présenter leur salut et prendre de ses nouvelles mais aucun ne l’exhorta à rejoindre les faibles troupes en route pour les quelques escarmouches de la journée. Il faut dire que le cœur des hommes est volage, uniquement porté par leur soif de gloire, et la récente ouverture des mythiques portes de la Moria avait porté un coup dur à cette campagne, tout aussi louable soit-elle. De plus, ils savaient que cette elfe n’était pas venu pour défaire l’ennemi. Pas maintenant.
Elle avait installé son petit feu de camp au bord de l’eau, se préparant à y passer la nuit. Son arc et ses armes étaient disposés soigneusement dans l’herbe haute, en attente d’un entretien. Elle enleva son lourd haubert de coupe naine, dévoilant un corps mutilé d’innombrables cicatrices qu’une chemise informe dissimulait à peine. Arnor recouvra de sa bienveillance ce corps sans âge. Combien de guerre, de combat elle avait pu bien vivre ? Si seulement ses marques pouvaient raconter leurs histoires. Elle avait beau sonder au plus profond de sa mémoire, tout ce qu’elle voyait n’était autre que les pierres moussues de la cité déchue. Quelle ironie pour celle qui ne savait rien de se réveiller au pied de la ville de la Clairvoyante d’Annuminas. Elle aurait tout donné pour frôler la sphère glacée du palantir, renvoyant aux limbes toutes les mises en garde à propos de cet artéfact. Ne pas savoir qui l’on est, est pire que la folie.
Sa mélancolie se berçait dans les flots du lac Nenuial, trois ans s’étaient écoulés depuis sa renaissance, trois ans qu’elle cherchait le courage de se confronter à son échec. Tous ses efforts, tout ses sacrifices, toujours ces pierres de la cité endormie qui muraient son esprit.
Pourtant, l’espoir était permis, plus que jamais le passé pouvait devenir sien et sa vie reprendre son cours. Mais un sentiment d’oppression la saisissait, un passé, elle en avait un nouveau, terriblement court, mais présent dans son esprit… Est-ce que son ancienne vie correspond à ses nouvelles aspirations ? Son amnésie n’a pu empêcher la construction de nouvelles amitiés, de nouveaux liens … Allait-elle abandonner tous ceux qui l’entourent pour reprendre sa véritable existence. Mais laquelle de ses vies était légitime ?
Tant de contradictions, de peur, d’incertitudes …
Elle, elle le savait, mais ne disait rien. Sa feuille de la Lorien qui se cachait dans le creux de ses seins. Helven prit son pendentif, unique lien avec son passé ou, du moins, supposé comme tel. C’est uniquement vêtue de ce petit bijou qu’elle fut retrouvée dans les ruines d’Annuminas, il y a trois ans … Une bien belle journée se souvient-elle …
***
« Où suis-je ? »
Elle tenta de se lever, mais sa jambe cassée ne pu la soutenir, son corps entier la martyrisait, du sang –son sang ?- lui voilait les yeux.
« Que s’est-il passé ? »
La lumière lui brûlait la rétine, des pierres, de l’eau, un lieu désolé par le temps, une douleur vive dans la main. Elle ouvrit le poing et vit l’attache d’une broche profondément enfoncée dans sa paume, une feuille de Lorien. Une peur sourde l’envahit :
« Quel est mon nom ? »
Le vent courait le long des rues de la cité, caressant son corps d’elfe, apportant des chants funestes, fuir, elle devait se cacher, mais de qui ? Elle rampa comme elle pu vers une anfractuosité de pierre antique… Trop lente ! Un autre chant s’éleva, proche d’elle, un langage rude, elle devra se défendre avec son corps brisé, la mort, l’oubli, la peur, des larmes d’incompréhension… Le chant s’arrêta, une vague de chaleur incontrôlable l’envahit, la douleur … la douleur s’atténuait … Elle entendit des notes de musique s’envoler, l’enveloppant, la couvrant d’un sentiment de bien-être, sa jambe ne la faisait plus souffrir.
Elle chercha du regard la source de ce réconfort, ses yeux tombèrent sur un petit être massif armé d’un luth et, faisant fi des dangers, qui chantait d’une voix forte des incantations dans un langage ancien. Elle se sentit mieux, suffisamment pour se redresser, exposant sa nudité aux yeux de tous et surtout à ceux du nain qui rata quelques accords en détournant son regard pudique. La musique s’arrêta, le nain enleva sa lourde cape de fourrure et la proposa à la femme elfe : elle sentait fort la crasse et la bière bon marché, ne couvrait qu’une partie de son intimité, mais elle s’en accommodera : Ce n’était ni le lieu ni le moment de jouer la prude. De toute façon, le nain avait l’air le plus gêné des deux et c’est avec le plus grand soin de ne pas fixer la poitrine de son interlocutrice qu’il brisa la glace :
« -Viens avec moi, femme elfe, Annuminas n’est pas un lieu de villégiature et j’aurai le plus grand mal à quitter ce lieu maudit si je dois t’avoir dans les pattes.
-Je ne saurais comment vous remercier pour vos soins, ménestrel, je vous dois la vie.
-Appelles-moi Helved, maintenant tais-toi et suis moi, nous parlerons plus tard.
Fuir Annuminas se révéla finalement simple, le ménestrel semblait connaître tous les recoins de la ville et se cacher des êtres maléfiques de ce lieu était une formalité pour lui, même avec un grand balai aux yeux pleins de stupidité comme elle l’avait entendu marmonner à quelques reprises.
« -Voilà l’île de Tinnudir, nous y serons en sécurité, tu vas pouvoir manger, boire, te vêtir et me raconter ton histoire ensuite.
-Je … je ne sais pas comment je suis arrivée ici, je ne sais plus …
-Ah … Sûrement la blessure à la tête... Ba, après un bon repas et quelques bières, tu te sentiras mieux, ça te reviendra. Tu sais ton nom quand même ?
-Comment je m’appelle ? … je… euh … je ne sais plus.
-Ta blessure a l’air plus grave que je ne pense … Ecoutes, j’aimerai rester, histoire de me rendre utile mais j’ai un truc à faire qui ne souffre d’aucun délai. Vais allez voir si y a pas un dunedain pour t’aider. Moi, les elfes, je connais pas bien, eux pourront mieux te rafistoler, y connaissent bien les elfes.
Et c’est donc ainsi que commença sa nouvelle vie, en traversant le pont de Tinnudir à moitié nue, accompagnée d’un ménestrel nain aux effluves douteuses.
Son cas avait éveillé les rumeurs les plus folles aux seins des dunedains, renforcées par cet étrange mur blanc qui bloquait sa mémoire. Des gens qui perdent la mémoire, cela arrive de temps à autre : Blessures, choc émotionnel, mauvaise utilisation de l’herboristerie… des situations inhérentes à cette époque de guerre. Mais une elfe portant le signe d’un des peuples les plus reclus au monde, perdue au beau milieu de ruines à des centaines de lieu de sa forêt, il y avait de quoi se poser des questions. Beaucoup avait un avis, mais aucun n’avait de réponse.
Un seul se fichait éperdument de son passé, Helved, le nain qui l’avait retrouvé. Il lui proposa le gîte, en Comté, le temps qu’elle puisse reprendre des forces. Il était ce que les humains appellent un vieux garçon, plus préoccupé par ses voyages, autant physiques qu’éthyliques, à la recherche de chansons et contes qu’une compagne afin de fondre un foyer. Vivait avec lui son cousin, Karvo, répondant bien plus aux standards de la race naine. Bourru, teigneux, cupide, il s’était spécialisé dans la taille des pierres de toutes sortes et les revenus générés par son art étaient largement suffisants pour nourrir une troisième bouche fut-elle elfe. En effet, le caractère libertaire du ménestrel avait déteint en partie sur le bijoutier et les convenances de leur race qui voulaient que les histoires elfes restent aux elfes, n’avaient pas cours dans cette maison. Tout au plus quelques piques avinées lors des soirées de la Ligue des Tavernes.
De constitution solide, l’elfe ne mis que quelques jours à se remettre des blessures de sa chair. Il en était tout autre en ce qui concerne sa mémoire, définitivement bloquée. A ses yeux, elle n’était plus rien, une coquille vide sans passé, sans famille, sans nom. Elle restait la plupart du temps enfermée dans sa chambre, tentant vainement de gratter ce mur de pierre qui celait sa vie, essayant de comprendre qui elle était. Jusqu’au jour où Helved rentra sans frapper dans sa chambre.
« - Bon, faut qu’on cause un peu. Ta méthode ne sert visiblement à rien, donc on va faire à ma façon. Déjà pour commencer, je vais te donner un nom. J’ai réfléchis un peu et je pense que celui d’Helven t’ira à la perfection. Vu qu’actuellement, je suis ce qu’on peut appeler ta seule famille, tu prends mon nom. La dernière lettre n’est autre que le radical khuzdul qui signifie obscurité. Ainsi, tout le monde saura que tu as en toi une part obscure… du moins par ceux qui parlent Khuzdul … ah et évidemment, tu n’as pas ton mot à dire là-dessus. Nous sommes d’accord ?
- je n’ai pas vraiment le choix …
- Exact ! Bien ! passons à autre chose ... t’as l’intention de rester les miches collées à ce plumard encore longtemps ?
- … Qu’est ce que je peux faire de mieux dans l’immédiat ? J’ai trois possibilités : allez à Annuminas tenter de trouver des pistes, allez à la Lothlorien voir si quelque me connaît là bas, et …
- … Et la troisième possibilité ?
- … je préfère ne pas en parler…
- D’accord, je vois le genre ! Bon, alors ? Annuminas ou la Lorien ?
- La Lorien est le choix le plus logique … enfin je pense. Mais d’une, c’est très loin d’ici, surtout si j’y vais seule … c’est quasiment inaccessible de ce que j’en sais… encore plus si je ne peux pas prouver mon lien avec ce peuple. Et si le bijou ne m’appartient pas, ce voyage ne sert à rien … Et même si on me reconnaît, ça ne m’avancera pas beaucoup, je ne vois pas comment ils pourraient m’expliquer ma présence à Annuminas … Retrouver les personnes qui font partis de ma vie n’est pas ma priorité … enfin si … mais ce que je veux c’est de savoir qui je suis … briser ce fichu mur … Tu sais quelle question je me posais juste avant que tu n’entres ?
- Non ? laquelle ?
- Tu vas sûrement me prendre pour une idiote, mais là, je commence à avoir faim … et je ne sais même pas ce que j’aime manger. C’est quoi mon plat préféré ? … Parmi toutes les questions beaucoup plus urgentes, j’ai ce genre de réflexion … qu’est ce que j’aime manger... je suis pitoyable … : dit-elle dans un sanglot
- Là j’ai fais de l’ours au miel pour ce midi, tu vas aimer ça, je te le garanti. Bon cette question est réglée, t’es pas mieux ? Quoi d’autre ? Allez, je suis lancé, je réponds à toutes tes questions dans la demi-heure et on passe à table.
L’elfe ne pu réprimer un léger sourire. Le nain reprit :
« - Bon donc la Lorien, c’est pas l’idéal … ça me semble logique, reste Annuminas.
- Oui … Après tout, ne dit on pas que lorsque l’on perd son chemin, il vaut mieux retourner au dernier point connu ?
- C’est un point de vue que j’aime pas mais oué, pourquoi pas …
- Ce n’est pas ça que tu fais ? quand tu te perds quelque part dans la nature ?
- Nan, quand je connais pas un coin, je le visite entièrement jusqu’à qu’il me devienne familier. Et j’avance un peu plus !… retourner sur ses pas, c’est une perte de temps.
- C’est une vision un peu simple…
- C’est la seule qui soit valable !
- …
- Bref, faut que tu retournes à Annuminas.
- Je pense que c’est le mieux à faire oui … Mais je ne peux pas y allez comme ça ... Annuminas est totalement envahi, je vais me faire tuer au bout de dix pas … et mourir sans savoir qui je suis, cela me terrifie encore plus. Remarque, la question sera réglée une bonne fois pour toute et je pourrais enfin me reposer…
- N’oublies pas que tu as une dette éternelle envers moi… il t’est totalement impossible de mourir tant que tu ne l’auras pas réglé. J’irai personnellement te chercher dans l’autre monde et te faire revenir à grands coups de pieds au cul, je te le garanti !
- …
- Bon tout ce qu’il faut, c’est te renforcer un peu côté art martial et aller à Annuminas chercher des pistes ?
- En gros oui.
- Ca tombe bien parce que hier, suis allé à Bree faire un petit tour et j’en ai profité pour chercher les jours de recrutement de la milice, histoire de suivre leur entraînement. Tiens, voilà la lettre d’engagement à présenter signée.
- … je vois. T’avais déjà tout prévu ?
- Héhé, et oué, c’est fini de jouer la pleureuse dans ta piaule. Maintenant, tu vas te bouger les rognons et faire ce qui soit être fait…. Bon c’n’est pas tout, mais vais me prendre une bière de mise en bouche, tu m’accompagnes ?
Deux jours plus tard, Helven franchissait la porte ouest de la ville de Bree. Le centre d’entraînement de la milice était un des passages obligés pour tout humain de l’Eriador qui se prédestinait à une glorieuse épopée, ou un rapide voyage au cimetière. Ce qui faisait de cette ville champêtre, un des points centraux des peuples libres. On pouvait également y croiser hobbit, nain ou, plus rarement, des elfes. Bizarrement, le fait d’être au contact de sa propre race mettait mal à l’aise la femme elfe. Peut être que l’un de ceux qui lui adressait un noble salut la connaissait elle ou un membre de sa famille ou qui d’autre encore ? Peut être qu’il avait entendu parler d’elle ? Le fait est qu’Helven avait disparu et que, s’il lui restait de la famille ou des amis, des recherches étaient peut être lancés dans l’espoir de la revoir un jour ? Est-ce qu’un des représentants de sa race était là pour elle ? Était-elle arrivée trop tôt ? Ou trop tard ? Pourquoi pas leur demander directement ? Non c’était idiot. Si effectivement l’un d’entre eux était à sa recherche, il l’aurait reconnu … Ou Helved l’aurait su, ce ménestrel avait l’art de savoir tout avant tout le monde, il lui aurait dit immédiatement …
C’est perdu dans ses pensées qu’elle arriva sur la place d’arme. Une foule cosmopolite s’y pressait, c’était jour de recrutement. L’elfe rejoignit une des files, l’attente serait longue et elle tentait de se vider la tête en écoutant des brides de vie qui s’échappait du brouhaha ambiant. On pouvait y croiser tout type de personnage, des jeunes gens rêvant d’aventure ou cherchant vengeance pour un frère ou un parent tué, des fanatiques de la lumière voulant détruire les forces de l’Angmar, des combattants émérites de lointaines contrées souhaitant perfectionner leur art auprès d’autres peuples … Mais ce qui revenait incessamment à ses oreilles était cette simple question : que fait cette elfe ici ? En effet, elle était la seule non-humaine à se présenter à la milice, les autres races des peuples libres ayant leur propre instruction militaire. Ce n’était pas plus mal se disait elle, si effectivement on la recherchait comme elle l’espérait, ce serait bien plus simple si tout le monde parlait d’elle comme la seule elfe ayant suivit un entraînement typiquement humain.
Au bout d’un long moment, ce fut à son tour de se présenter devant le recruteur, elle lui remit la lettre signée quelque jour auparavant par Helved. Le soldat lu très attentivement en jetant quelques regards inquisiteurs à la femme elfe.
« - Vous vous présentez donc pour une carrière d’archère ?
- Euh … Je ne sais pas, je sais juste que je suis sur les listes … Mais je ne savais pas qu’il fallait choisir déjà une voie … Je ne sais pas …. Euh, je n’ai jamais utilisé d’arme … C’est le fait que je soit une elfe ce choix d’archère ?
- Suffit. Vous posez trop de question.
- … Excusez-moi …
- Et arrêtez de me faire perdre mon temps, vous me prenez pour un lapereau de trois jours ou quoi ?! Vous êtes archère, vous suivrez l’entraînement pour archer.
- Comment pouvez-vous en être aussi sûr ?
- Vous vous fichez de moi ou quoi ? J’ai du travail, pas de temps à perdre en simagrée !
- C’est que … j’ai perdu la mémoire …
D’un coup, le recruteur s’adoucit :
- Oh pardon, excusez-moi ...
- Il n’y a pas de mal...
- J’ai plusieurs connaissances dans votre cas, les joies de la guerre on va dire... Je sais ce que vous endurer …
- Mais comment savez-vous pour moi ?
- Très simple … cela m’étonne que vous ne le sachiez pas : vos bras. Toutes ces entailles au niveau des avants bras que vous avez. Tous les chasseurs humains ont ce genre de cicatrices. Chez les elfes, elles n’existent pas, votre peuple est bien trop agile pour s’infliger de tels marques… sauf ceux qui utilisent cette arme dans un but martial : les cadences de tir sont bien plus importantes que pour la chasse, vous ajoutez le stress dû au combat et vous obtenez des elfes avec ces cicatrices. Si y a bien un truc de sûr, c’est que vous êtes une archère taillée pour la guerre.
- …
- Je vais vous mettre dans une section spéciale, que des soldats d’expérience… beaucoup dans le même cas que vous, cela va vite vous revenir, vous verrez…
- … Mais je n’ai aucun souvenir de cela … je ne vais pas y arriver…
- Si si, ne vous inquiétez pas ! Votre expérience de combat est bien là en vous, si vous ne vous en souvenez pas, vos muscles, eux, s’en souviennent. On va les réveiller et dans quelques temps vous aurez tout retrouvé … c’est fréquent ce genre de situation, on a l’habitude.
- Je ne sais comment vous remerciez…
- Inutile ma dame, je ne fais que mon métier. Maintenant, si vous pouviez vous écarter, j’ai encore beaucoup de monde à voir aujourd’hui : dit le recruteur en détournant le regard, se sentant rougir face au sourire angélique qui illuminait le visage de l’elfe.
L’elfe s’avançait vers le bâtiment de la milice … Finalement, c’était une belle journée qui se dessinait.
***
La pluie tombait drue dans le bois de Chet, rendant collante son armure, entravant ses mouvements. Elle redoublait de prudence, de peur qu’un mouvement malhabile ne trahisse sa position… Encore quelques pas et elle sera à bonne distance, son arc prêt à donner la mort. Ses cibles ne se doutaient de rien … Elle prit quelques instants pour s’assurer que tout était en place : un piège un peu en arrière en cas de fuite, ses fioles d’huile lumineuse dans sa petite poche au niveau de l’épaule … parfait.
En face, trois brigands qui déchargeaient le contenu d’une charrette dont les malheureux propriétaires gisaient sur le sol … Attendre qu’ils prennent quelque chose, qu’ils aient les bras chargés et qu’ils n’aient pas le temps de réagir …. Voilà. La corde se tendit rapidement, puis libéra le trait meurtrier. La première flèche eu à peine atteint la gorge de sa cible qu’une deuxième fut lancée, tout aussi précise.. Dans un réflexe inhumain le troisième brigand eu la lucidité de se jeter au sol, échappant à son châtiment d’un cheveu… il rampa derrière un arbre, impossible de le voir. Ce qui était également vrai pour le brigand qui ne vit pas la femme elfe jaillir de son buisson, armée de sa lance… En quelques foulées elle arriva à la hauteur de l’arbre, le contournant par la droite pour faire face à son ennemi. Celui-ci s’était relevé, la menaçant de son épée, il vociférait des insultes autant dues à la colère de la perte de ses amis que par la peur d’une mort imminente. Helven lui répondit simplement en portant un coup avec sa lance, suffisamment faible pour que l’humain puisse parer le coup et surtout lui laisser une ouverture dans sa défense, prestement exploitée par la chasseresse qui lui planta violemment sa dague dans le front.
Si elle avait déjà décidé de laisser les corps des brigands à la merci des bêtes et corbeaux, c’était un moyen peu coûteux de faire passer un avertissement, elle prit sur elle de ramener les corps des deux malheureux jusqu’à la ville de Bree, histoire qu’ils aient un enterrement décent. Alors qu’Helven attelait son cheval, elle entendit un léger bruit à l’arrière du chariot. Elle fit mine de n’avoir rien entendu, prenant discrètement sa dague puis d’un mouvement vif, sauta dans la charrette, soulevant la bâche qui couvrait le reste des caisses. Rien. Elle l’avait bien entendu pourtant ? Encore un faible bruit … Qui provient d’une des caisses ? Celle-ci n’était pas clouée au dessus… Quelqu’un se cachait dedans … Doucement, elle mit sa main sur la pièce de bois, l’autre armée de sa dague, prête à frapper. Elle prit sa respiration puis bondit. La lame d’acier s’arrêta brutalement.
« - C’est pas vrai …
Elle recula doucement, s’asseyant sur le rebord du chariot, son regard fixant sa découverte. Deux petites filles aux cheveux roux qui se blottissaient comme elles le pouvaient dans leur minuscule cachette. Helven rangea son arme, pris sa sacoche et en sorti quelques fruits sauvages qu’elle avait ramassé en route.
- Tenez, mangez ça … c’est très bon…
Les deux jeunes enfants osèrent un regard plein de terreur vers l’elfe, la plus grande des deux tenta même un geste pour saisir une fraise de la paume de l’elfe mais se ravisa et se blottit de plus belle. Helven se leva, posant les fruits à proximité des filles, puis sauta hors de la carriole. Elle n’avait absolument pas le temps de faire de la psychologie et chaque minute augmentait le risque de tomber sur une patrouille hostile. Ce n’était pas plus mal de les savoir cachées dans cette caisse, cela les préservaient d’une hypothétique attaque. Tout au plus, elle prit le plus grand soin de couvrir entièrement les deux victimes avant de les mettre dans le véhicule. Ce devait être sûrement les parents des deux petites, inutile de leur imposer la vue de leur corps mutilés.
« - Je vous amène à la ville de Bree, on va s’occuper de vous ensuite.
Le convoi avait progressé à faible allure, le cheval d’Helven n’étant pas taillé pour transporter de lourdes charges, et la ville se dévoilait peu à peu dans l’horizon. La femme elfe commençait à se détendre et tenta un début de conversation avec les deux rouquines :
« - Bon alors …. C’est quoi vos petits noms ?
Aucune réponse.
« - Vous n’avez plus rien à craindre vous savez ? Je vous protège maintenant … Alors … vous vous appelez comment ? … Moi c’est Helven.
Encore une fois, ce fut la plus grande des deux qui prit l’initiative :
« - Vous avez des oreilles bizarres … Ca vous fait pas mal ?
La chasseresse ne pu s’empêcher d’éclater de rire
« - Non non, ça ne me fait pas mal. C’est la première fois que tu vois ce genre d’oreille ?
La fille acquiesça de la tête.
- Je suis une elfe, on a tous des oreilles comme ça …et ta copine ? Elle avait déjà vu des elfes ?
- C’est ma sœur.
- D’accord … et elle s’appelle comment ta petite sœur ?
- Otila
A son nom, la jeune fille se tourna vers l’elfe, la fixant de ses grands yeux verts, les joues poisseuses de larmes.
« - Bonjour Otila… alors ? Tu avais déjà vu des personnes avec des oreilles comme les miennes ?
Helven s’approcha de la caisse histoire qu’elles puissent les voir de plus près mais se ravisa en voyant le mouvement de recul des deux enfants. Elle reprit comme elle pu le dialogue :
« - Vous n’avez pas touché aux fruits … vous n’avez pas faim ?
Les filles, de concert, hochèrent la tête.
« - oui, vous n’avez pas faim ? … ou oui, vous avez faim ?
Une fois de plus, le même mouvement de tête. Helven souriait devant le tableau :
« - au fait, ta petite sœur c’est Otila et toi ? Je ne sais toujours pas ton nom.
- Skali
- Bonjour Skali … Ce n’est pas un nom du coin ça, tu viens …
- Où sont nos parents ?
La petite voix fluette d’Otila désarçonna la femme elfe. Elle ne savait pas si les deux corps qu’elle avait embarqués étaient les défunts parents des deux fillettes
- Ils n’étaient pas avec vous ?
L’ainée répondit :
- Papa nous a dit de rentrer dans la caisse et de ne pas en sortir jusqu’à qu’il nous ouvre…Où est papa ? … Et maman ?
- Vous étiez dans la charrette avec votre papa et votre maman ?
Encore un hochement de tête des enfants, cette fois ci Helven ne souriait plus :
- Vous savez ce qui s’est passé une fois dans la caisse ? …
- On a attendu longtemps, y a eu du bruit et maman a crié … Des messieurs parlaient … mais papa nous a dit de ne pas sortir de la caisse… et t’as ouvert la caisse
- … je vois … Ecoutez les filles … je …
Les jeunettes fixèrent l’elfe de leur grand yeux plein d’espoir, déchirant le cœur de la chasseresse :
« - Je suis désolée … mais vos parents ont été tués.
Otila se remit à pleurer, Skali cria :
« - C’est pas vrai ! Papa a dit qu’il viendrait ouvrir la caisse !
- Ecoutez … je sais que ce n’est pas facile à entendre … mais c’est la vérité … J’ai aussi entendu votre maman crier … je suis venu voir ce qu’il se passait … Vous avez été attaqué par des brigands …
Les deux filles ne l’écoutaient pas, pleurant et gémissant dans leur caisse. Helven ne savait pas quoi faire, ce n’était pas vraiment le genre de situation où elle excellait, elle qui était déjà renfermée de nature.
« - Vous avez des tontons ou des tatas ? … des grands parents ? … Peut être un grand frère ou une grande sœur ? …
Skali se moucha d’un revers de la manche :
« - Y avait plus que papa et maman …
- Skali, d’où venez vous ?... peut être que si je préviens le chef de votre village ? …
- On vient du Rohan …
- Le Rohan ? … ce n’est pas la porte d’à côté … qu’est ce que vous faites aussi loin de chez vous ?
- Papa cherchait une ferme où on pourrait vivre.
- Et pourquoi ici ? le Rohan est vaste, il y a de bonnes terres dans votre pays.
- Papa avait une grande ferme avec tonton Ada … Mais elle a brûlé, et tonton et sa famille ont été tués … not’ village aussi a brûlé …
- … et donc ton papa cherchait une nouvelle ferme …
- y disait que le Rohan était très dangereux ! et qu’on devait allez loin pour qu’on soit loin du danger. Moi je voulais pas !
- Ton papa a fait ce qui était le mieux pour vous …
- Mais papa et maman sont morts maintenant …
- Tu sais, je suis sûr que s’ils étaient là … ils te diraient qu’ils sont rassurés de vous savoir en vie… C’est comme ça un papa et une maman, ils se fichent de savoir ce qui peut leur arriver du moment que leurs enfants vont bien …
Skali se remit à pleurer serrant sa petite sœur dans ses bras. Helven se releva et sauta hors de la charrette en marche, il était inutile de continuer la conversation dans l’immédiat. De toutes façon le convoi allait entrer dans le village de Combe, il fallait prévenir les autorités locales de l’attaque qui avait eu lieu et de mettre en place des équipes de veilleurs de route pour s’assurer qu’il n’y aurait pas de représailles de la part des brigands du bois de Chet.
D’ailleurs elle aperçu l’agent de l’ordre Soucolline, une vague connaissance qui datait de son instruction auprès de la milice. D’ailleurs celui-ci se dirigeait vers le convoi :
« - Helven ! Salut à toi … Qu’est ce que tu me ramènes ?
- Deux tués et leurs deux filles, en vie celles-ci...
- Je vois … il s’est passé quoi ?
- Des maraudeurs, ils en avaient après le contenu du chariot. Dis-moi ? qui s’occupe des enterrements dans ton village ? J’aimerai qu’il prenne en charge rapidement les corps. J’aimerai que les fillettes puissent assister à l’enterrement … enfin … tu vois …
- Oui, pas de souci, c’est le vieux Ted qui s’occupe de ça. A cette heure, il doit déjeuner à l’auberge. Et pour les filles ? De la famille ?
- Ba … selon la grande, ils venaient du Rohan.
- Du Rohan ?! mais qu’est ce qu’ils fichent ici ?
- Le gars voulait s’acheter une ferme, ils ont eu des problèmes chez eux, encore une attaque … pauvres gens…
- Faut pas chercher à comprendre … si le sort à décider de s’acharner sur toi, t’es cuit de toute façon … Donc plus de famille ?
- Faut croire, je les amène avec moi à l’orphelinat de Bree après l’enterrement.
- D’accord, ça marche.
- Méfies toi pour les brigands, je n’ai pas été suivit mais rien ne dit qu’ils ne vont pas chercher à se venger pour leur copains… Et t’es le village le plus proche.
- T’inquiètes, on organise un assaut de grande envergure pour reprendre les bois. Combe est blindée de Héros prêt à en découdre ... qu’ils viennent, ils vont être bien reçu
- Je vois ... bon, je file, je n’ai pas fini et j’aimerai arriver à Bree avant la nuit.
- Ca roule, à plus l’elfe !
- Au revoir.
L’enterrement s’était déroulé comme d’accoutumé, le vieux savait malheureusement comment y faire, quelques paroles de circonstances, les filles avaient compris l’importance du moment et étaient docilement sorti de leur caisse à la demande de l’elfe pour dire au revoir à leur parent. Sûrement par la faim qui les tenaillait également, vu la rapidité à finir leur repas promis par l’elfe après les funérailles. Helven donna la charrette et tout son contenu à l’humain contre l’assurance que les deux tombes soient un minimum entretenu. Il était temps de faire son rapport à la milice de Bree mais avant, il fallait déposer les deux enfants à l’orphelinat local avant la fermeture nocturne.
Vu le nombre d’enfants qui jouaient devant la bâtisse sans charme, elle était arrivé juste à temps, les deux rouquines la suivant comme son ombre, visiblement terrorisées. Helven frappa à la lourde porte où une jeune femme vint leur ouvrir :
« - Oui ?
- Bonsoir, je suis de la milice de Bree. Je vous amène deux jeunes filles.
- Bonjour vous deux : la femme s’agenouilla en s’adressant aux jeunettes. A ce geste, Otila et Skali saisirent vigoureusement les mains de l’elfe. Helven fut la première surprise. L’humaine eu un léger sourire :
- Elles sont effrayées vos deux protégées … C’est fréquent. Dans quelques semaines, ça ira mieux, le temps qu’elles se fassent des copines et qu’elles s’habituent au lieu.
- Je vous crois sur parole.
- Quelle est leur histoire ? Vous êtes certaines qu’elles n’ont pas de famille ?
- Et bien, de parent direct malheureusement non … D’ailleurs elles y ont assistés si vous voyez ce que je veux dire … Et selon elles, aucune autre famille… Elles viennent du Rohan.
- Je vois … Et vous vous appelez comment mes chéries ?
Voyant que la femme s’adressait encore à elles, les deux filles se blottirent fortement aux jambes de la chasseresse. Cette fois, elle se senti désemparée face à ce mouvement d’humeur. L’humaine reprit :
- Et bien, elles ont l’air de vous apprécier …
- Je ne sais pas quoi vous dire … elles avaient peur de moi il n’y a pas deux heures…
- Vous savez comment elles s’appellent ?
- Euh .. oui oui, la petite s’appelle Otila, et la plus grande Skali
- En tout cas, rassurez-vous, elles seront bien traitées ici. La ville de Bree fait des efforts conséquents pour que tout ces malheureux aient de quoi manger.
- A ce propos, si je peux vous aider financièrement, dites le moi, j’ai un peu d’argent … pour des vêtements ou pour vous … enfin, dites moi, je peux financer une partie...
- Non, je viens de vous le dire, tout ira bien pour elles. A la limite, venez leur dire bonjour de temps en temps... Mais éviter de passer trop régulièrement. Cela peut rendre jaloux les autres enfants.
- … très bien.
- Bien ! Et ben, je pense que c’est le moment de leur dire au revoir …. Je vais leur montrer leur chambre.
Comprenant ce qui se passait, les deux filles se serrèrent autant qu’elles le pouvaient aux jambes de l’elfe
- Allez les filles, suivez la dame, elle est très gentille vous savez …
- Allez, venez avec moi : dit l’humaine en prenant chacune des filles par leur bras.
Skali de démenait, Otila se mit à pleurer. Helven tentait ce qu’elle pouvait pour les rassurer et leur faire desserrer leur emprise.
- je viendrai vous voir bientôt, tout ira bien pour vous, faites mon confiance les filles …
- Non ! On veut pas ! Nous laisses pas ! : les deux rouquines se mirent à hurler et gesticuler pour se libérer de l’humaine. Mais elles ne pouvaient pas lutter contre sa force et se laissèrent traîner au sol, tendant leur bras vers la chasseresse, l’implorant du regard, la suppliant. Helven senti une larme couler le long de sa joue. Elle tentait de se justifier autant pour les filles que pour elle-même :
- Je vais venir vous voir bientôt ! On ira acheter des bonbons ! Soyez sage mes chéries … Vous allez vous faire pleins de copines ici !
Pour toutes réponses, des cris, des larmes, toute la tristesse de ces deux petites enfants ayant tout perdu.
Un temps splendide. Décidément, la Comté est la région la plus agréable qu’il ait jamais visité et s’installer ici est sûrement une des meilleures idées qu’il n’ait jamais eue. Le ménestrel se tenait sur le pas de la porte, une pipe au bec, appréciant la douceur printanière et réfléchissant à ses projets pour la journée. Une bière à Cul-de-Sac et s’il prenait sa mule, p’têt même un bon repas chez ses copains de la Ligue à Grand’Cave, en terrasse. Endroit idéal pour faire montre de son talent de conteur aux voyageurs de passage. Ou alors, il resterait tranquillement à la maison à boire des coups jusqu’à qu’il ne sache plus comment il s’appelait. Le choix était cornélien. Tout à ses pensées, son regard fut attiré par un mouvement au loin. Tout en masquant le soleil de sa main, il scruta ce qui ressemblait à un cheval précédé d’une personne de haute stature. Il était encore trop loin pour voir précisément mais ce cheval avait une drôle de forme.
« - Mais qu’est ce que … Oh ! Karvo !
Aucune réponse du bureau attenant. Helved insista lourdement :
- Foutreciel ! Karvo ! Vient voir ! … Oh l’animal ! Bouges tes rognons ! … M’obliges pas à venir te chercher ! …
Un vacarme assourdissant éclata dans le bureau, la porte vola presque en éclat.
- Quoi ! Qu’est ce qu’y a ! T’as intérêt à pas m’avoir fait sortir pour tes bêtises de soiffard !
Sans se retourner vers son cousin rouge de colère, il dit dans un sourire :
- Viens donc voir ce que la petite nous ramène.
Le bijoutier s’exécuta, le cheval était maintenant à distance suffisante pour voir son chargement.
- Foutreciel …
- Tu la dis l’ami …
- Mais qu’est ce qu’elle nous fait encore celle là ?
- Ba, suffit de lui d’mander... Oh ! Helven ! : héla le ménestrel en direction de l’elfe. Pour toute réponse, un regard penaud de celle qui venait de faire un geste insensé.
- Je croyais que t’étais parti en mission de surveillance au bois de Chet ?
- C’est le cas…
- Et ba !... C’est des champignons généralement qu’on trouve dans les bois non ? Pas des enfants ?
- Je ne sais pas quoi te dire Helved …
- T’as l’intention de nous ramener toute la misère du monde à chaque mission ?
- …
Karvo tourna les talons et retourna à son étude, adressant un regard convenu à son cousin. L’elfe était maintenant sur la propriété, aidant les deux filles à descendre du cheval. Helved s’approcha de la petite troupe. La chasseresse s’attendant à la question, prit les devants :
- Elles n’ont plus rien dans ce monde, elles peuvent rester ici ?
- Ca dépend …
- Je sais que ça fait deux bouches en plus à nourrir et que je te dois déjà beaucoup mais …
- C’est pas un problème d’oseille ma grande.
- Donc elles peuvent rester ? T’as demandé à Karvo avant ? je sais que toi tu es plus léger question financière mais lui l’est beaucoup moins.
- Je t’ai dis que le pognon on s’en fout, il est d’accord. Du pognon, on en a trop, c’est pas deux ventres humains qui arriveront à goinfrer nos économies.
- Où est le souci alors ?
- Ah mais y a aucun souci, idiote. Enfin pour moi j’entends.
- Ah ?
- Non, c’est ton souci. On paye ce que tu veux, mais tu t’occupes entièrement de ces deux enfants. Ecole, éducation, les bobos, tout le bordel, c’est pour ta pomme.
- Aucun problème.
Helved prit une voix plus discrète :
- c’est ce que tu devras dire à l’autre zouave, bien sûr que ça roule avec les deux poulettes, je m’en occuperais autant que je peux... Mais chut, pas à mot de ça à l’autre zigoto…
La chasseresse sourit devant son sauveteur :
- Décidément, rien ne peut entamer ta bonne humeur
- Hééé non !
Helved se tourna vers les deux filles qui le fixèrent :
- Comment vous vous appelez ?
- T’es petit, monsieur…
- Hé oué, je suis petit, pourquoi, t’aimes pas les petits ?
- Pourquoi t’es petit ? t’as pas mangé ta soupe ?
- Aha ! Je suis un nain triple buse ! Chez moi, les gens biens sont les gens petits. Ce sont aussi les plus grands par beaucoup de côté … rappelles moi de t’expliquer la théorie du L quand tu seras plus grande.
L’elfe coupa court :
- la quoi ? … C’est quoi ton histoire de théorie ?
Pour toute réponse, un haussement de sourcil et un sourire salace.
- Je vois … quand elles seront beaucoup beaucoup plus grandes hein ..
- Aha !
- Sinon la grande c’est Skali et la petite, Otila.
- Héhé, bonjour les filles … Dites, ça doit vous changer du Rohan ici non ?
- Comment tu sais ...
- Attends … rappelle moi ma profession s’il te plait ?
- … J’ai rien dit.
- C’est normal que tu sentes mauvais ? Demanda Otila.
- Hé oué, c’est parce que je mange les enfants ça !
A ces mots, Otila couru se blottir contre les jambes de l’elfe. Helven eu un regard noir envers le nain :
- Il raconte des bêtises. Il est très gentil tu sais ? Il connaît beaucoup d’histoire et joue de la musique. Il pourra te jouer d’un instrument si tu lui demandes gentiment.
- D’ailleurs les filles, vous connaissez l’histoire du troll qui voulait jouer à chat perché avec un ours ?
Les deux enfants répondirent par la négative, intriguées.
- Alors courez dans la maison et allez vous asseoir à table. Je vais vous servir un bon gâteau et je vous la raconterai. Ca vous va ?
Pas de réponse, les fillettes cavalèrent tête la première dans la maison sous le regard amusé de l’elfe et du nain. Le nain alla les rejoindre d’un plus débonnaire mais avant qu’il ne passe la porte, il s’adressa à Helven :
- Ça me surprend de toi.
- De quoi ? Que je ramène les deux filles ? … Qu’est ce que tu veux que je réponde. Que je me suis vu en elles ? et que j’ai tenté de faire comme toi à mon encontre ?
- Pas seulement … P’têt qu’un jour tu comprendras.
- …
- T’as eu une excellente idée de les faire venir ici. Elles vont être bien ici.